L'inquiétante progression du cancer colorectal chez les jeunes adultes
Longtemps considéré comme une maladie touchant principalement les personnes âgées, le cancer colorectal connaît une augmentation préoccupante chez les jeunes adultes. Cette tendance soulève de nombreuses questions au sein de la communauté médicale : pourquoi cette augmentation soudaine ? Les méthodes de prévention actuelles sont-elles suffisantes ?
Le cancer colorectal : un tueur trop souvent silencieux
Le cancer colorectal se développe dans le gros intestin (côlon) ou le rectum, soit au bout du système digestif. Il débute généralement sous forme de polypes, des excroissances bénignes sur la paroi interne de l’intestin. Avec le temps, certains de ces polypes peuvent évoluer et devenir des tumeurs.
Le cancer colorectal peut être un tueur silencieux, car il peut se développer sur plusieurs années sans présenter de symptômes évidents. Certains de ses symptômes peuvent être pris de des hémorroïdes ou autres troubles intestinaux bénins.
Les principaux symptômes du cancer colorectal
- Des troubles du transit, comme une constipation ou une diarrhée persistante ;
- La présence de sang dans les selles ;
- Des saignements rectaux ;
- Des douleurs abdominales, des crampes ou des ballonnements persistants malgré les traitements symptomatiques ;
- Une sensation de plénitude rectale ou un besoin fréquent d'aller à la selle ;
- Une fatigue inhabituelle ;
- Une perte de poids ;
- Des nausées et vomissements ;
- Une anémie.
Il n’est pas nécessaire de présenter tous les symptômes pour soupçonner un cancer colorectal. Au moindre doute, il faut consulter un médecin.
Les facteurs de risque du cancer colorectal
Les facteurs de risque du cancer colorectal sont multiples et souvent interconnectés ; ils se divisent entre facteurs non modifiables, et ceux attribués à l’hygiène de vie.
Parmi les facteurs non modifiables, on retrouve :
- L’âge : Le risque de développer un cancer colorectal s'accroît avec l'âge ;
- Les antécédents familiaux : Environ 20% des cas sont liés à l’hérédité. En outre, certaines maladies génétiques comme le syndrome de Lynch ou la polypose adénomateuse familiale font aussi partie des facteurs de risque ;
- Les maladies inflammatoires de l'intestin : La maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, par exemple, augmentent le risque de développer ce type de cancer.
Focus sur les facteurs liés au mode de vie
- L’alimentation : Une consommation élevée de viandes rouges et transformées, et une faible consommation de fibres, fruits et légumes peuvent augmenter le risque de cancer colorectal ;
- La sédentarité : Le manque d'activité physique est un facteur de risque majeur ;
- L’obésité, notamment l’excès de graisse abdominale ;
- Le tabagisme et la consommation d'alcool sont deux facteurs de risque majeurs dans de nombreux cancers.
L'augmentation du cancer colorectal chez les jeunes : Comment l’expliquer ?
L'inquiétante progression du cancer colorectal chez les jeunes adultes de moins de 50 ans a d’abord été observée aux États-Unis. Elle commence à se manifester en Europe. A l'hôpital Gustave Roussy, on observe une hausse de 13% des cancers colorectaux chez les moins de 50 ans en France en 2022. Cette tendance est notée dans d’autres pays, comme en Suisse.
Des études sont en cours pour comprendre les causes de cette augmentation, mais les résultats prendront du temps (de 10 à 20 ans). Les raisons exactes de cette recrudescence chez les jeunes restent un mystère pour le moment. Certains spécialistes l’attribuent à plusieurs facteurs :
- L’évolution des habitudes alimentaires, avec une consommation accrue d'aliments ultra-transformés, la diminution de l'apport en fibres et l’augmentation de la consommation de fast-food ;
- Nos modes de vie de plus en plus sédentaires, avec l’augmentation du temps passé devant les écrans et la diminution de l'activité physique quotidienne ;
- L’épidémie d’obésité ;
- L’exposition à des polluants et perturbateurs endocriniens qui modifient notre microbiome intestinal ;
- Un retard de diagnostic, avec un manque de sensibilisation des jeunes aux symptômes et la réticence des médecins à envisager un cancer colorectal chez les jeunes patients.
Il ne s’agit là que de pistes ; il faudra encore plusieurs années pour les confirmer ou pour soulever d’autres facteurs de risque encore inconnus à ce jour.
Des défis spécifiques pour les jeunes patients
Cette nouvelle population de patients jeunes nécessite une approche différente de la maladie et de sa prise en charge. L'impact social, professionnel et familial du cancer est plus important chez les jeunes adultes. En outre, les préoccupations des patients jeunes diffèrent de celles des patients plus âgés : elles incluent la fertilité, la carrière et la sexualité. La prise en charge des patients de moins de 50 ans nécessite donc des dispositions particulières qui devront être amenées à évoluer avec l’augmentation des cas de cancer colorectal au sein de cette population.
Faut-il abaisser l’âge du dépistage du cancer colorectal ?
Face à cette tendance, la question de l'abaissement de l'âge du dépistage systématique se pose. Les États-Unis ont déjà abaissé l'âge recommandé pour le dépistage à 45 ans en 2021. Du côté de la Suisse, cette question est actuellement débattue comme un enjeu de santé publique. Certains médecins sont favorables à un dépistage universel commençant plus tôt, malgré les coûts potentiels.
La prévention : la clé pour inverser la tendance
Même si les causes de l’augmentation du cancer colorectal chez les jeunes n’est pas encore bien établie, la prévention joue un rôle important pour éviter les cas évitables, ceux liés au mode de vie. Quelques mesures simples à inscrire dans son quotidien peuvent grandement aider à prévenir le développement de cette pathologie.
Alimentation et tabagisme
- Augmenter la consommation de fruits, légumes et fibres ;
- Limiter les viandes rouges et transformées ;
- De manière générale, privilégier les aliments bruts, non transformés ;
- Limiter la consommation d’alcool ;
- Arrêter de fumer.
Activité physique
- Viser au moins 30 minutes d’activité physique modérée par jour, ceci incluant les activités du quotidien ;
- Réduire le temps passé en position assise, se lever régulièrement si l’on pratique un métier sédentaire.
Dépistage et sensibilisation
- Envisager un dépistage précoce pour les personnes à risque élevé
- Être attentif aux symptômes, même chez les jeunes adultes
Enfin, former les professionnels de santé à cette nouvelle réalité épidémiologique serait un pas de plus vers une meilleure prise en charge chez le jeune adulte. Du fait de leur jeune âge, les patients peuvent parfois subir plusieurs années d’errance médicale avant d’obtenir un diagnostic, de précieuses années qui peuvent faire évoluer le cancer jusqu’à un stade critique. Espérons donc que cette nouvelle réalité sera mieux prise en compte dans les années à venir.
Sources :